Témoignage : Qui est sainte Madeleine-Sophie pour moi ?

Je vais commencer mon témoignage avec une citation de Sainte Madeleine-Sophie, que j’ai reçue le Jeudi Saint :
« Quelle vie occupée que la nôtre ! Fasse le Seigneur que nous ne le perdions jamais de vue, et qu’il soit toujours le principe de nos actions comme il doit en être la fin. »

D’hier à aujourd’hui : un appel toujours vivant

Cette citation illustre bien le paradoxe que sainte Madeleine-Sophie représente pour moi. Madeleine-Sophie était une femme du XIXème siècle : sa façon de parler, de se vêtir, son grand habit noir et sa coiffe, sa conception des différentes classes sociales de la société, sa façon de vivre la vie religieuse… Elle était une femme de son époque, et par conséquent, assez éloignée de la mienne !

Et en même temps, si on traduit cette phrase dans un vocabulaire un peu plus moderne… cette phrase aurait pu être écrite la semaine dernière ! N’est-ce pas d’une crainte actualité, cette impression de courir sans cesse pour réaliser nos multiples activités, le plus souvent bonnes et orientées vers les autres, mais qui peuvent nous épuiser si elles ne sont pas inspirées par Dieu et nourries par la prière.

Alors, que me dit-elle aujourd’hui ?

Madeleine-Sophie est née en 1779, elle avait 10 ans au début de la Révolution française, son histoire personnelle et l’histoire de la congrégation des Religieuses du Sacré-Cœur de Jésus est intimement liée à cette période profondément troublée de l’Histoire de France. Une période de mutation de la société, une période de déchristianisation (où on guillotinait les religieux et éventrait les tabernacles)… qui par certains aspects peut nous rappeler la nôtre et peut-être nous inspirer pour vivre aujourd’hui.

Une femme de prière

Sainte Madeleine-Sophie, c’était d’abord une femme de prière pour qui la vie intérieure était primordiale. La citation avec laquelle j’ai commencé, souligne bien qu’en toutes choses et bien que la vie quotidienne des religieuses du Sacré-Cœur soit bien remplie, toute activité doit partir de la rencontre prolongée avec le Christ dans la prière, tout ce que nous faisons doit être déposé en Lui, afin que ce soit l’Esprit Saint qui nous guide et nous inspire. Dans les très nombreuses lettres qu’elle a écrites à ses sœurs tout au long de sa vie, Madeleine-Sophie les encourageait sans cesse à la vie d’oraison et de prière. Aujourd’hui, ces écrits m’encouragent à développer, de plus en plus, une relation intime avec Jésus, à essayer de découvrir les sentiments et les préférences de son Cœur, à consacrer du temps à mieux le connaître, afin de l’aimer davantage.

Une éducatrice passionnée

Sainte Madeleine-Sophie, c’était aussi une éducatrice. C’est ce qui m’a attiré en premier, chez elle, et plus généralement dans la Congrégation des religieuses du Sacré-Cœur. Elle disait que « pour une seule âme d’enfant, elle aurait fondé la Société du Sacré-Cœur ». A sa suite, il m’arrive souvent de me lancer dans un projet éducatif, comme animer un camp « cuisine » avec des ados, alors que je n’aime pas faire la cuisine, ou déployer beaucoup d’efforts pour faire progresser, un tout petit peu, un seul de mes patients, en me répétant « pour une seule âme d’enfant »… aucun effort, aucune audace, n’est trop grande. A la suite de sainte Madeleine-Sophie, j’apprends à croire en chaque enfant et chaque jeune rencontré et je crois vraiment que grandir, c’est développer toutes les dimensions de sa personne.

Une femme de relations

Sainte Madeleine-Sophie, c’était aussi une femme qui avait une facilité pour entrer en relation avec tout un tas de gens, des princesses et des cochers, ses sœurs, les enfants dans les écoles, les notables… Je retrouve cette qualité chez beaucoup de Religieuses du Sacré-Cœur : une capacité à nouer des relations personnelles, à considéré chaque personne quelque que soit son âge ou son milieu social, comme précieuse et digne d’intérêt. A être éducatrice, pas seulement dans le cadre institutionnel des écoles du Sacré-Cœur, à son époque, ou aujourd’hui de nos activités professionnelles, mais dans toute rencontre. Il y a de belles histoires de Madeleine-Sophie ayant de conversations spirituelles avec les cochers des diligences qu’elle empruntait pour se déplacer à travers l’Europe… parfois j’y pense lors de mes trajets en Blablacar. Les diligences ont peu changé d’allure…mais le goût de la rencontre est toujours là !

Une visionnaire

Enfin, sainte Madeleine-Sophie était une femme qui avait une vision politique. A l’origine de la fondation de la Congrégation, il y a une vision, reçue dans la prière : fonder un groupe de 24 religieuses, capables de se relayer toute la journée pour adorer Jésus dans l’Eucharistie, ce qui lui paraissait à la fois beaucoup et bien peu… Sainte Madeleine-Sophie se mit alors à rêver de former une foule d’adoratrices pour témoigner de l’Amour du Christ sur toute la Terre. Pour elle, l’éducation, n’était pas seulement un moyen de faire grandir, chaque enfant individuellement pour lui permettre de déployer les dons que le Seigneur a déjà semés en elle, ce qui serait déjà un but très louable ! Pour Sainte Madeleine-Sophie, l’éducation était un moyen de transformer la Société, par l’éducation des femmes qui deviendraient épouses et mères. Cette intuition me semble très actuelle. Plus que jamais, dans notre Monde mondialisé où l’information et la désinformation, circulent très vite, nous avons besoin d’hommes et de femmes capables de réfléchir, de discerner à la Lumière de l’Esprit Saint et de prendre des décisions en faveur du bien commun et de la dignité de chaque personne.

En bref, sainte Madeleine-Sophie était une femme du XIXème siècle, bien ancrée dans son époque, et plus encore ancrée dans le Cœur de Jésus. C’est ce qui la rend, malgré tout, très proche de nous, car notre Monde a plus que jamais besoin de connaître l’Amour de Dieu.

 

Françoise, rscj